Le Real en route pour une remontada historique : il y aura un Match 5 à Madrid !
Qui avait réellement la tête à un match de basket en Serbie ? Mercredi matin, à 8h40, l’horreur s’est abattue sur Belgrade, en plein cœur de la ville, lorsqu’un adolescent de 13 ans a ouvert le feu sur ses compagnons de l’élève Vladislav-Ribnikar, tuant de sang froid huit élèves, dont une jeune Française, et le gardien de l’établissement. Mais avec les calendriers surchargés, il était impossible de reporter la rencontre. Alors les deux équipes ont joué, les spectateurs sont encore venus remplir la Stark Arena mais le cœur n’y était pas totalement. « On se réveille un beau matin, on apprend cela et pourtant, on doit continuer à aller s’entraîner et à se concentrer sur le basket alors que des gens ont perdu leurs enfants », soufflait Ioannis Papapetrou. Pour tous ceux qui y ont laissé leur vie, juste avant l’entre-deux, des centaines de fleurs ont atterri sur le parquet, lancées de tous les recoins de la salle, après une minute de silence, d’autant plus poignante lorsqu’elle survient dans un temple du bruit comme celui-là.
« Des gens ont perdu leurs enfants et nous, on doit continuer à jouer au basket… »
Pendant une mi-temps, les spectateurs ont fait vœu de silence. Pas de chants, quelques applaudissements pour les paniers du Partizan Belgrade, des huées nourries pour le Real Madrid et les arbitres. Et… c’est tout. Une atmosphère pesante, immensément loin de la folie de mardi dernier, qui a semblé anesthésier les Serbes, impuissants face à la justesse madrilène et l’adresse chirurgicale d’Adam Hanga (13-27, 10e minute), auteur d’un 3/3 de loin dans le premier quart-temps.« Bien sûr que le drame de mercredi a eu un effet », admet Danilo Andjusic (7 points en 19 minutes), l’ancien meilleur marqueur de Betclic ÉLITE qui a lu un texte d’hommage aux victimes en compagnie de Nigel Williams-Goss avant le match. « Cela nous a tous profondément touchés et cela s’est vu au début. Dans de telles circonstances, il était très difficile de ne penser qu’au basket. » Mais à Belgrade, il est aussi difficile de contenir une telle passion. Cela en démangeait certains de chanter, cela s’est ressenti sur un triple de Papapetrou (26-32, 13e minute) ou sur le fantastique alley-oop entre Danilo Andjusic et Zach LeDay (39-40, 18e), et la ferveur est finalement revenue après la pause. Le moment choisi par le Real Madrid pour prouver, si besoin était, qu’il ne faut jamais parier contre lui.
« Ce sont des joueurs avec un million de matchs comme celui-ci dans les jambes », a pointé Andjusic, qui avait pourtant renversé la Stark Arena en donnant au Partizan Belgrade son premier avantage à la 25e minute (51-49). Or, l’expérience a parlé. Avant de se blesser gravement au genou et de quitter la salle en pleurs, Gabriel Deck avait été extrêmement précieux (14 points), toujours en première ligne dans son style caractéristique. Éternel du haut de ses 36 ans, Chacho Rodriguez a envoyé deux tirs de très haut niveau (72-76, 37e minute). Et puis, même quand il a les jambes lourdes après avoir tout donné sans back-up depuis deux jours (3 minutes pour Cornelie, Poirier blessé), Walter Tavares (71 d’évaluation sur le périple serbe) fait toujours 2,21 m à la fin d’un match… Flash-forward vers la dernière minute : sur deux interceptions, dont une improbable déviation dans le cercle d’une passe de Nigel Williams-Goss, Yam Madar a redonné l’espoir à tout un peuple (78-80). Sur la possession suivante, après un échec d’Adam Hanga, Mario Hezonja a sauté une fois, deux fois, trois fois. En vain… Jusqu’à ce que l’immense cap-verdien ne se mêle à la lutte, prenne le meilleur sur Mathias Lessort et catapulte le ballon dans le filet avec la faute (78-83). Rideau (78-85, score final). « Comme mardi, un rebond de Tavares a encore décidé du match », articulait Zeljko Obradovic, beaucoup plus affecté qu’il y a 48 heures. Le nonuple champion d’Europe pourra également regretter les errances offensives des siens, toujours souffreteux sans Kevin Punter. Le Partizan a ainsi shooté 10 fois de plus que le Real Madrid (67 tentatives, contre 57) et a tout de même perdu… Si l’on ajoute les lancers-francs (10/19, dont 5/10 pour le seul Lessort, contre 17/19), la frustration est encore plus grande.
Une première historique pour le Real ?
Dans la plus pure tradition de sa section football, dont les improbables retours des dernières années en Champions League ont inspiré leurs homologues basketteurs, le Real Madrid est ainsi en passe de revenir de l’enfer. Menés 0-2, les hommes de Chus Mateo ont arraché un cinquième match décisif, contre toute attente, et pourraient devenir les premiers à remonter un tel déficit dans l’histoire de l’EuroLeague. Quoiqu’il arrive, il y aura une première puisqu’a contrario, en 15 Matchs 5, jamais une équipe ne l’a emporté à l’extérieur. « On a bossé toute la saison pour avoir l’avantage du terrain », a indiqué le technicien ibérique. « On l’a récupéré, tant mieux mais cela ne suffira pas. » Car mercredi, le Partizan Belgrade sera au complet, avec le come-back tant attendu de Kevin Punter, tandis que le Real devrait être privé de Gabriel Deck, en plus de Guerschon Yabusele, suspendu. « Vu d’où revient le club avec tant d’années en EuroLeague, si on nous avait dit en début de saison qu’on serait à 2-2 et à un seul match du Final Four, on aurait signé », tente de positiver Ioannis Papapetrou. « On va aller à Madrid pour essayer de mieux jouer, pour se donner à 100% et on verra bien. » Car, de toute façon, ce jeudi soir, Belgrade n’avait vraiment pas le cœur à la fête…
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