Vichy : Vivre et mourir avec Tray Boyd III

Tray Boyd III commence à avoir l’habitude. Partout où il va cette saison en Pro B, le meneur vichyssois est l’ennemi public n°1. « Notre premier objectif était de le stopper », reconnaissait ainsi Savo Vucevic, l’entraîneur de l’Élan Chalon, vendredi soir. « Quand il est bon, son équipe joue bien. Notre défense sur lui a été extraordinaire. » Certes à la limite de la légalité lors du premier quart-temps, ce qui a entraîné l’expulsion de Guillaume Vizade pour deux fautes techniques après moins de… 8 minutes de jeu, mais les efforts combinés du trio Antoine Eito – Galen Robinson – Kevin Harley ont ainsi permis à l’équipe bourguignonne de le complètement éteindre le phénomène Boyd. « Je me suis fait tabasser ce soir », a-t-il tweeté dans la foulée, avant d’enchaîner à la troisième personne. « Le manque de respect à mon égard était ahurissant. Mais TB, tu dois t’attendre à ça lors de chaque match. Va faire des soins, prépare le prochain en vidéo et sois prêt à te remettre au travail. Tu vas rebondir. »

Got beat the fuck up tonight. The disrespect towards me was horrific. But TB you expect that nightly. Go ice, watch film on next game, and be ready to get back in lab. You gone bounce back fasho Everytime.

— TB🏀 (@Traytb1) December 23, 2022

8 victoires pour la JAV : Boyd toujours à plus de 20 points
4 défaites : Boyd toujours à moins de 20 points

À seulement 24 ans, Tray Boyd a encore largement le temps d’apprendre et devra effectivement capitaliser sur cette soirée difficile sur les bords de Saône pour grandir. Car de fait, la première fois de la saison, le natif de Memphis s’est retrouvé complètement maîtrisé : seulement 2/16 aux tirs au Colisée, avec un désastreux 0/13 pour commencer. Une véritable prouesse de la part de l’Élan, puisque personne n’y était arrivé avant : en le contenant à 7/23 mardi soir (oui, soit 9/39 sur ses dernières sorties), Nantes avait bien cru avoir trouvé la solution mais l’Américain est sorti de sa boite avec deux shoots décisifs dans le money-time. Autrement, Boyd avait empilé les cartons : 36 points et 6 passes décisives contre Boulazac en Leaders Cup, 32 points et 8 passes décisives face à Saint-Vallier, 31 points et 6 passes décisives contre Orléans…Comme partout où il est passé, lui qui a toujours au moins été dans le Top 2 des meilleurs scoreurs des championnats dont il a pris part. « C’est le talent que Dieu m’a donné », disait-il mi-novembre à La Montagne. « J’ai eu des rôles différents dans chacune de mes équipes, mais marquer fait partie de qui je suis et mes entraîneurs m’ont toujours mis en position pour être le meilleur marqueur du système. Donc j’ai juste l’impression de faire ce que je suis censé faire. »

Si sa sélection de tirs laisse encore parfois à désirer (38,4% de réussite), comme tout jeune scoreur de cette trempe, Tray Boyd survole actuellement la deuxième division, meilleur marqueur du championnat avec 21,8 points par match. Mais logiquement, la JAVCM va devoir apprendre à être moins dépendante de lui. « Même si Tray n’est pas forcément en réussite, ce n’est pas grave, il faut continuer d’avancer », plaide Léopold Delaunay. Sauf que les chiffres disent encore l’inverse… Il est descendu seulement cinq fois sous la barre des 20 points, mais cela a coïncidé avec les quatre défaites vichyssoises. En revanche, lors des huit victoires, l’ex-lycéen de Memphis a toujours émargé à plus de 20 unités. « Dans les soirées où vous ne mettez pas de tirs, c’est difficile de continuer, de se battre contre soi-même », explique son entraîneur Guillaume Vizade. « Il faut lui reconnaître cette qualité ce [vendredi] soir : il n’a pas abandonné, il s’est démené. Les Chalonnais se sont relayés pour le couper du ballon. Lui, son arme, c’est le scoring. Si l’on avait jugé que c’était vraiment trop, on l’aurait mis sur le banc. Mais il faut assumer que ce soit notre leader tant les jours où il a beaucoup de réussite que les soirs où il en a moins. À lui aussi peut-être de se réguler, et à nous aussi de le faire sur les temps creux. »

Une pioche fantastique pour la 15e masse salariale

Si l’on excepte cette soirée ratée au Colisée, Tray Boyd III ressemble toutefois à un choix fantastique de Guillaume Vizade, tant son parcours relevait de l’anonymat jusque-là. Diplômé d’East Tennessee State en 2020, il a attendu sur la touche pendant un an, devant se résoudre à un spot dans une ligue mineure américaine, la TBL, avec les Tampa Bay Titans au printemps 2021, puis la signature d’un premier contrat professionnel en deuxième division finlandaise (!). À créditer de 35 points de moyenne avec Huima, il a été promu dans l’élite à Kouvot, avant de partir en travaux d’étés en Nouvelle-Zélande, avec les Otago Nuggets. Révélateur des coups que la JAV est obligée de tenter, du haut de ses finances limitées, elle qui possède le 12e budget et la 15e masse salariale du championnat. « C’est sûr que c’est une vraie bonne pioche », acquiesce Guillaume Vizade. « Nous sommes contraints de faire des paris à tous les niveaux, sur des jeunes joueurs, en espérant que les étrangers que l’on prend vont se révéler. Les tops joueurs de Pro B sont inatteignables financièrement pour nous. Notre ambition est d’être un club stable de la division et de faire émerger des jeunes. Nous avons la plus jeune moyenne d’âge, moins de 23 ans. Nous avons la volonté d’avoir un basket de relance, avec de l’agressivité et de l’intensité, de regarder tout le monde les yeux dans les yeux. Mais nous n’avons pas une ambition démesurée. On veut juste faire la meilleure figure possible. Avec la 15e masse salariale du championnat, on construit avec nos armes à nous. » À cet égard, avec Tray Boyd III, la JAVCM a mis sur la main sur une sacrée gâchette. Et même s’il y aura certainement d’autres soirées sans, Vichy les acceptera très facilement, tant que son talent permettra de les maintenir dans la partie haute du championnat…

À Chalon-sur-Saône,