[Rétro] Quand R.J. Barrett, la star canadienne, jouait en mini-poussins en France
Dans les entrailles de la sublime Indonesia Arena, R.J. Barrett se retrouve subitement propulsé à plus de 14 000 kilomètres de là, direction le plus vétuste Palais des Sports Michel-Geoffroy de Dijon, et ses fameux sièges oranges de l’époque. « Mes premiers souvenirs de basket sont en France », glisse-t-il dans un sourire, à l’approche du grand rendez-vous de Jakarta contre les Bleus. Et bien plus que ses premiers souvenirs… Ses premiers dribbles, ses premiers shoots, ses premiers matchs, sa première licence même, signée en 2005/06 avec la section baby-basket de l’association JDA Dijon. « C’était cool », lance-t-il. « De toute façon, quand tu joues au basket et que tu es gamin, c’est toujours génial. Je me rappelle que les paniers étaient plus bas. Je me souviens tout particulièrement de l’ASVEL et de Chalon, c’était vraiment chouette. Mais ce qui me revient surtout en mémoire en évoquant la France, c’est d’avoir regardé mon père jouer depuis les tribunes. C’est quelque chose qui me reste encore en tête. »
À juste titre puisque R.J. Barrett est le fils d’une petite légende de Pro A, Rowan Barrett. Successivement passé par Dijon (2003/05), Lyon-Villeurbanne (2006/07) et Chalon-sur-Saône (2007/08), le Canadien a été All-Star 2003, a remporté la Semaine des As 2004 avec la JDA et a été meilleur marqueur du championnat en 2005 (21,5 points). « Quand R.J. a démarré sa formation en France, c’était compliqué pour moi de venir le voir jouer car j’avais souvent match en même temps. Mais ma femme n’arrêtait pas de venir le voir : Viens le voir, il est bon, il est très bon. Je lui répondais : Pfff, laisse-lui le temps, il est trop jeune. Mais un jour, j’y suis allé et elle avait raison, il était bon ! En plus, il était surclassé. Il avait deux ans de moins que le reste et il dominait. Ah oui, là, j’ai réalisé que c’était quelque chose. »
L’attraction du championnat mini-poussins de Saône-et-Loire !
Ainsi, avant de devenir un n°3 de draft NBA et une étoile montante des Knicks, plus jeune New-Yorkais de l’histoire à parapher un contrat à plus de 100 millions de dollars, R.J. Barrett a notamment été une star du championnat… mini-poussins de Saône-et-Loire avec l’Élan Chalon. « À sept ans, il était déjà l’attraction », se remémore Mattias Fernandez, l’un de ses éducateurs à l’Élan. « C’était une brindille, 20 kilos tout mouillé », renchérit Arnaud Filin, son ex-entraîneur bourguignon. Et surtout déjà un vrai basketteur… « Il était très mobile et agressif d’un bout à l’autre du terrain », ajoute Filin. « Il était facile et bien au-dessus de ses coéquipiers pour son petit gabarit de l’époque. À tel point que j’avais dit à mon référent qu’il pourrait déjà évoluer en benjamins région, soit avec les 12-13 ans. » Avec des prédispositions peu communes pour un gamin de sept ans : « un dribble entre les jambes, un vrai shoot à trois points », énumère Fernandez, « même s’il en abusait parfois, juste pour montrer qu’il pouvait y arriver. »
Champion officieux départemental de Saône-et-Loire en mini-poussins à l’issue d’une saison sans défaite, le petit Rowan Alexander Junior était bien intégré, Francophone, « super cool, super gentil et super agréable ». Reparti au Canada, à Mississauga, dans la foulée de son passage chalonnais, il a gardé une petite influence de ses années européennes. « Ça m’aide énormément », clame-t-il. « Même maintenant, je sais que je peux jouer un jeu différent que le basket américain. » Une affirmation légèrement douteuse, avec seulement trois saisons de baby-basket et mini-poussins, mais corroborée par son père dans la foulée. « Oh oui, c’est vraiment très intéressant pour lui d’avoir appris à jouer en France. Il y a quand même été jusqu’à huit ans, il a joué des vrais matchs, ce qu’il fait qu’il comprend le jeu FIBA un peu mieux. Je me rappelle d’exercices de passes, où il fallait toujours trouver le joueur ouvert et se démarquer : passe, partage, vision du jeu, comprendre que la balle va plus vite que le joueur si l’on joue collectif. C’est très différent de ce que l’on voit en Amérique, où c’est plus individualiste, où c’est à celui qui dribble le mieux. Du coup, on a dû corriger un peu cela en rentrant car chez nous, si tu attends le ballon tout seul en étant ouvert, tu ne pourras jamais jouer. Mais cette vision collective reste son éducation première. » Ou comment la formation française pourra ainsi se targuer vendredi d’avoir treize produits sur le parquet de Jakarta pour France – Canada…
Quand Rowan Barrett participait à la plus grande surprise de l’histoire de la Semaine des As
« C’était inévitable que l’on joue la France », s’amusait Rowan Barrett mercredi soir, à l’issue du deuxième entraînement de la journée. Intégré au staff de la sélection canadienne en 2012 après avoir travaillé pendant quatre années au sein de la banque nationale, devenu GM en 2019, le shooteur originaire de Scarborough a vécu ses plus belles années de joueur en Pro A, avec Dijon (2003/05), l’ASVEL (2006/07) et Chalon (2007/08). « Cela reste de super souvenirs », sourit-il. « Ce qui m’a marqué en France, c’est à quel point l’équipe de basket est importante dans une ville. Surtout à Dijon d’ailleurs. La salle était toujours pleine, j’avais l’impression que toutes les entreprises locales étaient des sponsors du club. En étant si loin de la maison, c’est important d’être accepté par une communauté. Toute ma famille a apprécié notre passage en France. »
Meilleur marqueur de Pro A en 2005, Rowan Barrett a notamment marqué les esprits à Dijon, élu dans la seconde équipe idéale de la JDA par les lecteurs du Bien Public en 2020. « La première fois que je l’ai vu, c’était à la télévision », raconte Jérôme Monnet, pivot bourguignon à l’époque. « Je m’étais dit : Mais quel joueur, comment a-t-on réussi à le récupérer ? Le GM, Yann Boisson, était fier de son coup. Quand il est arrivé, on a de suite vu qu’il était très bon et très pro. C’était un gros scoreur, avec de grosses qualités athlétiques, du tir extérieur, capable d’attaquer le cercle. Je me suis souvent demandé pourquoi il n’était pas en NBA. De plus, c’est quelqu’un de très sympa et humble, sans aucun doute l’un des meilleurs joueurs avec qui j’ai joué. »
Une connexion dijonnaise qui se ressent jusqu’à Jakarta, puisqu’on a eu la surprise de noter la présence de Boniface Ndong, son ancien coéquipier, dans le staff de la sélection canadienne. Le Sénégalais était de la formidable aventure mulhousienne de la JDA en 2004, le plus grand exploit de l’histoire de la Semaine des As, avec le huitième, Dijon, qui était allé au bout de la compétition, avec un lancer-franc décisif de Rowan Barrett en finale (62-60 contre Le Mans). « Personne ne s’attendait à ce que l’on remporte la Semaine des As », se rappelle l’ancien joueur de Boca Juniors. Et pas même les Dijonnais eux-mêmes puisque la légende dit qu’aucun d’entre eux n’avait emporté assez de vêtements pour le week-end. « Le club n’avait pas gagné beaucoup de trophées avant (la Coupe de la Ligue 1993, ndlr). On avait une bonne équipe, bien équilibrée, on se partageait le ballon et surtout, on gagnait. Il n’y avait que des bons gars : notre capitaine Laurent (Bernard), Paccelis (Morlende), Vato (Natsvlishvili)… C’était une super expérience ! »
À Jakarta,
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