Paco Laulhé et Biscarosse en finale de la Coupe des Landes : « Je comprends parfaitement qu’on puisse les débecter »
Paco Laulhé et Biscarosse défient l’ESMS
Biscarrosse affronte l’ESMS dans les arènes de Mont-de-Marsan, ce samedi 1er juin, en finale de la Coupe des Landes masculine. Un dernier match qui, en cas de victoire, permettrait à la bande à Boris Diaw de concrétiser un projet aussi fou que clivant dans le sud-ouest. Paco Laulhé, l’entraîneur de Bisca, nous en dit davantage sur cette aventure hors norme, à quelques heures de son dénouement. Entretien.
Comment vous appréhendez cette finale ? Quelles vont être les clés pour l’emporter face à l’ESMS (l’Élan Souémontain Montgaillardais Sarrazietois) ?
Assez joyeusement. C’est quand même Boris Diaw qui m’a sollicité avec les autres éléments de l’équipe pour lancer ce projet. Quand t’as la chance d’accompagner un mec comme ça, même si je le connais depuis tout jeune… Il y a toujours eu beaucoup de complicité entre nous, et notre amitié ne date pas d’hier. Idem avec les autres. Donc je savoure ce moment. On avait l’habitude de se retrouver une fois par an pour les fêtes de Bayonne et là on a passé l’année ensemble. Je savoure donc chaque minute, comme mercredi, quand on s’est entraînés au milieu des arènes de Mont de Marsan (où se tiendra la finale de Coupe des Landes samedi soir, devant 8 000 spectateurs). Pour revenir à la finale, vue l’avance qui sera la nôtre à l’entre-deux (Biscarrosse partira avec 49 points d’avance contre l’ESMS), je pense que n’importe qui pourrait coacher. Par contre s’ils reviennent à notre niveau ou passent devant, alors je devrais me remettre à coacher. Là je pianote, on fait 4 dessins sur la plaquette… Alors que le vrai coaching il commence à 0-0 et si c’était le cas samedi, s’ils arrivaient à revenir au score, alors ce serait pas la même. Parce qu’on est pas tout à fait outillés pareil. Demain (samedi) je risque de devoir mettre des gens dans le rouge, parce que le pick & roll de l’ESMS, avec Rémi Lesca capable d’envoyer et Abdoulaye N’doye qui est un platane des plus robustes, il va falloir le stopper. Et il n’y a pas grand monde chez nous qui a les réflexes et le physique pour le faire.
Comment avez-vous adapté votre coaching avec cette bande d’anciens pros en pré-retraite ?
Le moindre mec qui a du bon sens, capable d’observer les amplitudes de la cage thoracique et la couleur des pommettes des joueurs, il peut coacher cette équipe (rires). Je coache avec un sablier. Je gère les temps de jeu et j’essaie d’anticiper pour pas que les gars finissent rôtis. Après je le fais pas n’importe comment. J’essaye de garder un équilibre entre mobilité, défense, menace offensive et compréhension du jeu. On a des cadres qui impactent beaucoup la qualité du jeu. Et quand je les mets sur le banc, inévitablement, ca se ressent.
« Ils étaient précurseurs sur tout! »
Cette Coupe des Landes 2024 est un retour aux sources pour vous, qui les avez connues il y a bien longtemps…
Oui je les ai connues dès 1999 avec les filles de Castelnau Chalosse, lorsque j’ai pris la succession de Pierre Dartiguelongue, aujourd’hui à basket Landes avec Marie-Laure Lafargue. J’ai eu la chance de jouer des quarts et des demis, mais je ne l’ai jamais gagnée. J’aimerais d’ailleurs profiter de cette tribune pour rendre leurs lauriers à ceux qui l’ont construite cette Coupe de Landes. Parce que dans les autres départements, elle n’a pas la même puissance. Et ça on le doit à Jacques Dorgambide (qui a gagné la Coupe des Landes avec Elizabeth Riffiod, la mère de Boris Diaw) et toute sa clique dans les années 70. Des gens comme Guy Candau (dont le nom a été donné à la coupe masculine), Jean Bouytau, Michel Jouclas, Claudine Latrubesse, et j’en passe, qui ont passé plus de soirées qu’on pourra en passer nous dans n’importe quelle association, pour mettre cette coupe sur pied. Ils ont innové, en décidant de faire jouer les équipes dans des arènes, avec les bandas, en faisant systématiquement jouer les filles à côté des garçons, etc. Je sais pas si vous imaginez ?! Ils étaient précurseurs sur tout ! Malheureusement personne ne parle d’eux alors que c’est grâce à leur travail qu’on se chamaille aujourd’hui au sujet de Biscarosse.
Comment Boris Diaw vit-il cette première Coupe des Landes ?
C’est une telle force tranquille… Il traverse la Coupe des Landes comme il traverse sa vie. Par contre il est concerné et assume pleinement ses responsabilités quand besoin s’en fait sentir. Il ne prend pas le truc à la légère, mais il est capable de relativiser aussi. Même s’il y a des imperfections dans notre jeu d’attaque et qu’on ne peut pas faire tout ce qu’il adorerait qu’on fasse, notamment dans les réponses tactiques, il ne dit rien. Il est indulgent et n’incrimine jamais personne. Il ne va pas gueuler sur un type. Et quand il cherche à remobiliser, il parle toujours au groupe, sans pointer quiconque du doigt.
« Les Yeux dans les Bleus » version Bisca
Quel est exactement son rôle dans cette équipe de copains ?
C’est notre phare. Temps clair ou brouillard, on ne voit que lui ! (rires) D’autres ont aussi connu le monde professionnel, comme Simon Darnauzan, Nicolas Gayon, ou Cédric Beesley, et ont un statut dans l’équipe. Mais si Babac dit qu’il a pas envie de rentrer au vestiaire à la mi-temps pour s’éviter des pas inutiles, on restera au bord du banc. Il est central. Il est au cœur du projet, qu’il a initié en grande partie. Il est consulté systématiquement. On se réfère à lui. Le mec est champion NBA !
Sentez-vous la pression monter ? Y a-t-il une effervescence particulière a quelques heures maintenant de la finale ?
Je dois reconnaître qu’avec Skweek, qui a fait « Les Yeux dans les Bleus » version Bisca, on bénéficie de la couverture d’une équipe pro dans la qualité de ce qui est réalisé alors qu’on pratique un basket de niveau département. Ça agace certains mais pour ceux qui sont ravis de revoir Babac, pour eux, c’est fête ! On a une dernière fois la chance de le voir, dans un truc un peu sympa et atypique, etc. Donc il y a beaucoup de réjouis aussi. Il y a les gens qui vont se délecter de voir le dernier épisode, et ceux qui vont le regarder en le vomissant.
« Avec la Coupe des Landes, on touche au sacré »
Vous souffrez des critiques sur la façon dont vous jouez avec les règles pour tenter de ravir cette Coupe des Landes ?
Depuis le début de l’aventure, je me suis mis dans une bulle pour ne pas subir l’amertume légitime de tous ceux qui étaient contre ce projet, parmi lesquels des amis proches. J’ai du le faire en réalisant qu’entre le moment où j’ai dit « oui on y va » au fond d’un bar à Bayonne le dernier soir des feria, et le jour où j’ai rencontre Rémi Lesca et Romain Hillote aux fêtes de Dax, qui me disent que notre projet est « lamentable », certains considéraient qu’on avait fait quelque chose d’irrecevable. Depuis, je ne l’ai pas super bien vécu. Donc tout au long du parcours, je me suis mis dans ma bulle pour me protéger. Même si j’assume mon choix. Et si on ne la gagne pas, ça m’empêchera pas de dormir. Parce que je n’y ai pas mis d’affect.
Vous comprenez ces réactions ?
Bien sûr. Je comprends parfaitement qu’il y ait des réactions de ce type. Avec la Coupe des Landes, on touche au sacré. Donc on ne vient pas dans cette cour sans mériter d’y être. Et nous dès l’instant où on vient jouer avec le règlement, qu’on s’inscrit sciemment en Départementale 3, qu’on fait croire qu’on est très très vieux – même si les gars sont réellement abîmés, ça pose un souci à certains. Mais c’est à nous qu’il faut en vouloir, pas au comité des Landes. C’est important de le dire parce qu’ils ont pris cher alors qu’ils n’y sont pour rien. Ils ont un règlement, donc il est difficile de penser qu’en fonction de l’équipe qui s’inscrit, ils vont changer les règles.
« Ils vont nous saccager, les mecs vont finir tuméfiés »
Vous n’êtes plus qu’à une petite victoire du précieux sésame. Avez-vous un jour pensé que vous n’y arriveriez pas ?
Je dois être sincère. Dans le bar le premier jour, y a des mecs qui disaient : « Mais t’imagines ! Avec 40 points d’avance, on fait zone et c’est terminé ». C’est la réalité. Claude Bergeaud en a parlé aujourd’hui (vendredi) dans la presse. Et c’est vrai que c’est ubuesque de démarrer un match avec 40 points d’avance. On a été malins, coquins aussi. Ça relève de la filouterie, sans qu’elle soit méchante. Alors aujourd’hui on est à la place d’une autre équipe, c’est certain, et je comprends parfaitement qu’on puisse les débecter.
Vous travaillez dans le conseil et le coaching en parallèle du coaching. Prévoyez vous de rempiler l’an prochain avec Biscarrosse ?
Pour les joueurs comme pour moi, essayer d’éviter les sangliers et les chevreuils sur la route en rentrant de l’entraînement, c’est terminé (rires). Plus sérieusement, on a notre compte. Personnellement je suis cuit. Mais on a voulu y être, alors on l’assume. Et samedi Montsoué va nous dire : « Vous avez voulu le faire ? Vous allez voir ! » Ils vont nous saccager, les mecs vont finir tuméfiés… Non, ça suffit. Tout le monde a les arthroses qui sifflent, y a plus assez de cachetons anti-inflammatoires en pharmacie, on a tout pillé ! (rires)
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