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Luca Banchi raconté par les anciens de la SIG Strasbourg : « Il n’a pas été reconnu à sa juste valeur en France »

Si le trophée de meilleur coach de la Coupe du Monde existait, il serait très sûrement attribué au sélectionneur letton Luca Banchi. La saison dernière, le technicien italien est passé par la France, initiant le redressement de la SIG Strasbourg. Certains de ses anciens joueurs et son ex-adjoint Romain Leroy racontent son crochet par l'Alsace, où il n'a laissé que des bons souvenirs.
Luca Banchi raconté par les anciens de la SIG Strasbourg : « Il n’a pas été reconnu à sa juste valeur en France »
Crédit photo : Tuan Nguyen

Léopold Cavalière : « Je garde vraiment un très bon souvenir de son passage à la SIG. Déjà parce qu’on a su redresser une situation catastrophique, en étant 3e du championnat sous ses ordres. Ce que j’ai beaucoup apprécié chez lui, c’est son management. Il savait impliquer tout le monde, mettre tous les joueurs sur un pied d’égalité. Humainement, en dehors du terrain, on pouvait échanger et rigoler avec lui. Il savait mettre exactement la bonne distance avec ses joueurs. Il a su mettre tout le monde au diapason et on a tous eu envie de se battre à la fois pour l’équipe et pour lui jusqu’au bout. Ce qui fait qu’on a pu accrocher les playoffs, c’est la patte Banchi. Techniquement et tactiquement, c’est très fort aussi mais ce n’est peut-être pas le meilleur coach que j’ai pu avoir dans ces domaines. En revanche, le côté management était au-dessus de tout ce que j’ai pu connaître jusque-là. Il avait la bonne dose entre le fait d’être plus sévère ou plus laxiste quand il fallait l’être. Il savait rigoler avec nous ou nous gueuler dessus quand c’était nécessaire. En Italien en général, et je ne suis pas trop dépaysé cette année puisque c’est pareil (avec Massimo Cancellieri).

La première chose qu’il a écrit sur le tableau dans le vestiaire le jour où il est arrivé, c’était : « Power of the Last ». Cela renvoie à l’urgence que tu ressens en tant qu’outsider. C’était clairement notre cas à la SIG puisque nous étions derniers. Idem pour la Lettonie à la Coupe du Monde, clairement pas favorite. Ils étaient déjà dans un groupe très relevé et ils sont passés. Ensuite, ils continuent de gagner des matchs et d’impressionner. C’est la similitude que je peux retrouver entre eux et nous. Luca arrive toujours à motiver ses équipes, peu importe la position et les pronostics. »

Luca Banchi, icône fugace de la SIG Strasbourg

Romain Leroy (son ancien adjoint) : « À titre personnel, je connais Luca depuis 2011 ou 2012. Quand j’ai passé mon diplôme FIBA, j’avais sympathisé avec Alessandro Magro, désormais coach à Brescia, assistant à Sienne à l’époque. J’ai passé une semaine pour voir ce qu’il faisait à Sienne, qui était l’une des plus grosses équipes d’EuroLeague. J’avais fait connaissance avec le bonhomme, j’avais pu avoir un aperçu de sa façon de travailler. Depuis, nous n’étions pas spécialement restés en contact mais il me passait parfois des coups de fil pour avoir des informations sur des joueurs passés par la France.

Quand la connexion s’est faite entre la SIG et lui, j’avais a priori super positif à son égard, tant par ce que j’avais suivi de lui que des retours qu’on m’a fait à son propos. Je n’ai pas été déçu, personne ne m’a menti. Luca est un mec très exigeant au quotidien, qui va t’essorer, qui demande énormément de choses mais qui est tellement bienveillant et humain dans son approche que tu ne peux que le suivre. Il est le premier à mettre de l’énergie dans son boulot. C’est le cliché américain mais il est le premier arrivé à la salle et le dernier parti. Ce qu’il exige de toi, il fait pareil : s’il te demande de regarder 10 matchs, il le fera aussi. S’il te demande de bosser 3h sur de la vidéo, pareil. Il est très précis et minutieux dans son approche. Sa plus grande force est sa capacité à fédérer et à emmener les gens autour de lui. Il fait preuve d’une réelle égalité de traitement : il a parlé de la même façon à Lucas Beaufort et à Marcus Keene pendant toute la saison. Il a une capacité à être à la fois sur un très haut de travail et d’exigence, tout en conservant une vraie honnêteté intellectuelle et de la sincérité dans les rapports humains.

Le mec ne triche pas, est fondamentalement sain et donne envie de bosser pour lui. Moi, si on me dit demain que je repars avec lui, je le fais.  C’est presque frustrant de n’avoir bossé que huit mois avec lui. À ses côtés, j’ai franchi un vrai cap sur énormément d’aspects. Cela a été une collaboration enrichissante. J’ai notamment pris une vraie leçon de management quand il est arrivé : son message était incroyable dans la mesure où il a fait comprendre aux joueurs que c’était eux qui avaient la clef plutôt que de les enfoncer parce qu’ils étaient derniers. Il a pris les choses à l’envers. Cet été, avec les U20 féminines, je me suis énormément inspiré de lui : j’ai gardé beaucoup de ces concepts de jeu. Sans être réducteur, son basket est basé sur beaucoup de choses très simples. Vu qu’il a coaché dans cinq championnats différents, c’est un basket passe partout, basé sur des fondamentaux collectifs, sur le fait de se créer des habitudes et une identité de jeu. Pour cela, c’est beaucoup de répétitions à trois contre zéro, quatre contre zéro, cinq contre zéro. Par exemple, Lucas Beaufort dit qu’il a beaucoup plus galéré dans le cinq contre zéro que dans le cinq contre cinq dans la précision et l’exécution de ce qui était demandé. Luca sait aussi parfaitement cibler et insister sur les points faibles adverses, des deux côtés du terrain.

Je ne suis pas du tout surpris par ce qu’il réalise avec la Lettonie. Il est dans l’adversité, il lui manque des joueurs cadres. Ça le place dans une position d’outsider, quelque chose qu’il aime beaucoup. Quand je vois ce que fait un Rodi Kurucs et son apport défensif, notamment lorsqu’il est envoyé en mission sur Nando De Colo contre l’équipe de France, c’est quelque chose que l’on avait utilisé à la SIG. Je retrouve des similitudes dans le plan de jeu, le contenu, la mobilité : un collectif offensif et défensif, avec des mecs qui jouent les uns pour les autres. C’est le basket moderne. »

Luca Banchi : « Cette équipe n’a plus besoin de coach »

Bodian Massa : « C’est un coach assez proche des joueurs. Il essaye de comprendre un maximum comment ses joueurs jouent. Il arrive à transcender par ses discours, il parle énormément, il explique beaucoup de choses. Il est très précis et pointilleux sur ce qu’il demande. Même si tout va à l’encontre de son équipe, comme des blessures ou autres, il arrive à te donner les bons mots pour que tu puisses ne pas y penser et être focus à 100% sur ce qu’il exige. En terme de basket, il a souvent les réponses justes. On voit que la Lettonie ne figurait pas parmi les favoris de base mais ils ont battu l’Espagne, le Brésil, la France… Cela correspond à ce que je dis : il arrive à transcender ses joueurs et à cibler ce qu’il va falloir des deux côtés du terrain. Il demande beaucoup d’intensité. C’est l’une des choses primordiales avec lui. « 

Lucas Beaufort : « J’ai eu une très bonne expérience avec lui. Quand il est arrivé à la SIG, il a de suite imposé sa façon de travailler, sa façon de faire. Il a été direct avec nous. La première fois qu’on s’est vus, on s’est tous réunis dans le vestiaire et on sentait qu’il dégageait vraiment quelque chose. On ressentait toutes ses années d’expérience en tant que coach, notamment dans le détail aux entraînements : il était très pointilleux sur tout ce qu’on faisait, le cinq contre zéro ou le cinq contre cinq. C’était quelque chose qui me choquait : on pouvait faire des heures d’entraînement sans contact, juste à cinq contre zéro. Je n’avais jamais vu quelqu’un d’aussi pointilleux. En revanche, je ne suis pas choqué de voir là où il en est avec la Lettonie à la Coupe du Monde car c’est un vrai meneur d’hommes. Il sait comment réunir ses gars, faire en sorte qu’ils jouent un basket comme s’ils étaient frères. Devenir des frères d’armes sur le terrain, c’était son mot d’ordre. Bien sûr que je ne m’attendais pas à ce qu’ils battent la France mais leur parcours ne me surprend pas plus que ça non plus. Je suis très content pour lui car il mérite vraiment tout ce qui lui arrive. En France, il n’a pas été reconnu à sa juste valeur. Maintenant, les gens commencent vraiment à savoir qui il est, l’homme qu’il est, le coach qu’il est. On oublie vraiment tout ce qu’il a fait avec Strasbourg : quand il est arrivé, on était à 1-7, à la dernière place et on se retrouve à faire les playoffs, à aller jusqu’en quart de finale de BCL, en demi-finale de Coupe de France. Tout ça avec des hommes en moins, des blessures… Ce qu’il a fait à la SIG n’a pas été assez reconnu et les gens comprennent maintenant réellement qui il est. Personnellement, je lui dois beaucoup car il m’a vraiment fait rentrer dans la rotation. J’ai pu gratter des minutes avec lui, il me faisait confiance grâce à mon côté défensif. Je pense qu’il m’a fait devenir un peu plus un homme et un joueur pro surtout. Je dois aussi le remercier par rapport à ça. »

[L’œil de coach Soares] Lettonie – Espagne, le chef-d’œuvre de Luca Banchi

 

 

 

 

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