Le constat d’échec de Vincent Collet : « Le match est allé vers l’équipe qui en avait le plus envie »
Après la défaite de l’équipe de France contre la Lettonie ce dimanche soir à Jakarta, qui empêche les Bleus de pouvoir accéder au deuxième tour, le sélectionneur de l’équipe de France Vincent Collet s’est exprimé devant la presse français.
Sur la dynamique du match, on avait le sentiment sur le fin que le match vous échappez un peu.
C’est tout à fait exact. Même s’il y a eu des circonstances qui auraient pu être plus favorables. Sur le dernier tir raté d’Evan, on a quand même deux claquettes qui paraissent relativement marquables, surtout la deuxième de Rudy. La balle lui échappe. Et puis même derrière il y a encore le tir ouvert de Sylvain. Mais le match est allé vers l’équipe qui en avait le plus envie au global. Eux, ils étaient possédés. Même même en difficulté, ils n’ont jamais renoncé. On a été plutôt solide pendant environ trois quart-temps mais malgré tout ils nous posaient quand même des problèmes. Nos 12 points d’avance, on les devait déjà une adresse qui était une bonne facture et globalement on faisait des choses intéressantes. Mais on sentait bien qu’ils allaient se battre jusqu’au dernier souffle et ils ont été récompensés. Sur le dernier quart-temps, c’est à nouveau les mêmes péchés mignons qui nous condamnent : les balles perdues, les rebonds offensifs aux pires des moments. Comme depuis le début de la prépa’.
Il y aussi cette exclusion de Nando De Colo…
Clairement, c’est le tournant du match. C’est sûr. Pour le coup, c’était quand même le moment où on commençait à mettre un peu la main sur le match. Au-delà des points qu’ils ont marqué en direct sur cette faute antisportive, c’est surtout sur la suite, la gestion… Déjà, ils sont passés très vite en boîte sur Evan sur quelques possessions. Il a fallu qu’on s’adapte, c’était dur. On ne peut pas demander tout ça à Sylvain (Francisco). C’est difficile pour lui.
« Ça rappelle aussi l’humilité »
La faute antisportive, synonyme d’expulsion, était-elle justifiée ?
Honnêtement, il y avait faute sur lui. Peut-être qu’elle était aussi antisportive celle qui avait sur lui parce que l’autre lui coinçait le bras. Et comme il ne l’a pas sifflé… Mais par contre sa réaction, je pense que, malheureusement, il ne peut pas en être autrement.
C’est l’un des plus gros échecs de l’histoire de l’équipe de France…
Surtout avec ce qu’on pensait être devenu. Mais ça rappelle aussi l’humilité. Je ne l’ai pas dit assez fort avant qu’on commence la compétition mais on ne peut pas être performants à ce niveau dans un tel concert de concurrence si on n’a pas l’humilité pour se battre. Ça n’empêche pas l’ambition. Bien sûr qu’il faut aussi du talent, mais ce qu’on a pu faire ces dernières années n’étaient pas fait qu’autour du talent. Le croire serait une erreur fondamentale. C’était un travail de tous les instants pour être une grande équipe. Et là clairement sur ces deux matchs on n’en a pas été une.
Après le Canada, vous disiez « on a pris un uppercut mais on va rebondir »…
(Il coupe) Mais on a rebondi. Bien sûr c’est dur à chaud de faire une analyse mais sur le match de ce soir on a vraiment rebondi malgré tout. Mais pas suffisamment dans la durée et en particulier dans l’emballage final. Si on avait été capables de faire ne serait-ce que ce qu’on a fait dans les trois premiers quart-temps, on aurait gagné ce match à minima. Mais par contre, clairement, il aurait été difficile d’aller chercher une qualification pour les quarts dans les oppositions qu’on aurait du connaître contre l’Espagne et le Brésil.
Nicolas Batum parlait de remettre un certain nombre de choses à plat à un an des Jeux. Il a notamment parlé de « politique ».
Avant de parler de ça, il faut déjà qu’on se concentre sur nous. Ça partait d’un bon sentiment le fait d’annoncer haut et fort des objectifs. Mais est-ce que c’était bien réaliste eu égard des différentes saisons qui avaient pu être effectuées cette année ? Vraiment, l’humilité pour moi est au cœur de ce qu’il s’est passé. Il faut en remettre et repartir. On sait ce qu’on a été capable de faire il y a vraiment pas longtemps. On doit être capable de le refaire mais à la condition de travailler avec nos valeurs, avec notre identité et on s’en est un petit peu éloigné cette année.
Pensez-vous qu’il y a eu une certaine forme de suffisance en se disant « on a fait trois podiums, on a fait une finale d’Europe sans Batum ni De Colo… »
C’est la nature humaine, ce n’est pas que français. Nous on va dire que c’est très français mais je pense que c’est un peu partout pareil. Et puis notre préparation s’est plutôt bien passée. Ça ne remet rien en cause. Mais on sait que la préparation et la compétition ce n’est pas la même chose parce qu’en compétition il y a l’impact. La façon dont on a été impacté par le Canada vendredi montrait bien qu’on n’était pas prêt à ça. Ce soir c’était un peu mieux mais on a quand même eu du mal dans plein de situations. On leur a couru derrière. Peut-être parce qu’on parce qu’on en manque d’impact justement, peut-être en terme de d’équipe. Mais aussi je pense par l’engagement et la détermination.
La préparation justement. A-t-elle été faite de la bonne manière ? On a entendu plusieurs fois des critiques sur la qualité des adversaires, le décalage horaire…
Tout ça ce sont des éléments qui ont joué effectivement. Un ou deux déplacements difficiles. Ce sont effectivement des choses qui comptent, il ne faut pas le nier. Mais je pense que ça dépasse ça. Ça s’est ajouté au reste. Mais je pense que c’est le reste le plus important. On s’est quand même vu plus gros que ce qu’il fallait. Je me souviens en 2019 on avait l’ambition aussi, mais où personne ne nous attendait parce qu’on sortait d’un Euro qui était raté. Je me souviens comment les choses se sont faites dans la durée. On n’était pas en finale avant de jouer le premier match, il fallait battre l’Allemagne déjà. Et en fait c’était même plutôt l’inverse, c’était les Allemands qui pensaient qu’ils allaient nous battre facilement et en fait, on leur a sauté à la gorge comme le Canada nous l’a fait vendredi. A partir de là on a grandi, on s’est amélioré, on a progressé. Pour moi, c’est les souvenirs que j’ai de toutes les dernières compétitions. Y compris celle de l’année dernière qui était moins bonne que les deux précédentes. On avait quand même progressé dans la compétition. Rentrer sur la pointe des pieds n’empêche pas d’avoir de l’ambition. C’est simplement du respect pour le niveau. C’est du très haut niveau donc tu ne peux pas venir en pensant que le simple fait d’arriver va te permettre (d’être bon). Aujourd’hui c’était moins le cas parce que je pense que la claque prise vendredi nous avait quand même remis dedans. Mais après il se passe toujours ce qu’il se passe dans ces cas-là : un peu moins de confiance, tu perds un peu de ta sérénité quand tu reçois ce qu’on a reçu vendredi. Surtout quand tu ne t’y attends pas.
Qu’est-ce que ça signifie à un an des Jeux olympiques de Paris. Est-ce que c’est un gros pas en arrière ?
Ce que ça signifie, pour l’instant, je ne peux pas le dire. Il faut qu’on analyse. Ce qui doit être indispensable, c’est la remise en question quand ce genre de choses arrive. Même si on avait gagné ce soir, il aurait été dur de se qualifier. Il faut réfléchir aussi à ce dont on a besoin. On a vu des choses dans ces deux matches. Combien on a pris de points ce soir ? 88, après les 95 de vendredi. Sur quoi on a fait des médailles ? Sur l’identité défensive. Si elle n’a pas disparu, elle s’est effritée. Il faudra nécessairement commencer par la déjà.
Sur les individualités, derrière Evan Fournier et Nando De Colo à l’arrière, il a manqué de relais.
C’est un élément aussi, il faudra qu’on enrichisse cette équipe. Mais surtout, il faudra qu’on retrouve l’identité défensive. C’était deux styles très différents mais les deux fois on les a pas stoppé. Même quand on menait ce soir contre la Lettonie de 12 points à la fin du troisième quart-temps, on avait encaissé 20 points à tous les quart-temps. De ce que je me souviens, toutes nos performances se sont d’abord adossées à un niveau défensif qui était toujours très élevé et qu’on n’avait pas cette année.
Enrichir cette équipe derrière, est-ce faire revenir Thomas Heurtel ? Est-que vous regrettez son absence sur cette compétition ?
Je le savais avant donc ça serait facile de dire maintenant que je le regrette alors que je savais de toute façon qu’il ne pouvait pas être là. Il ne faut pas déplacer le débat même si toutes les choses ont de l’importance bien entendu. Mais ce n’est pas vers là qu’il faut se tourner pour avoir toutes les solutions.
Les joueurs se sont placés sur ce débat là.
Ils peuvent le faire. C’est eux. Moi je place le débat déjà sur notre identité défensive. Pour moi, c’est clair : surtout avec l’équipe qu’on a. Voilà. On n’a jamais dominé le monde avec notre attaque. Peut-être que ça ne leur plaît pas que je que je dis ça mais c’est la réalité. Ça ne veut pas dire qu’on ne faisait pas des choses en attaque mais ce n’est pas l’attaque qui nous a fait prendre les médailles ces dernières années, c’est la défense.
Pour les trois matches à venir : « J’espère qu’on va être capable quand même de rester ensemble »
Sur le thème de l’état d’esprit, aviez-vous vu des signes avant-coureurs en préparation ?
Non parce que quand tout va bien… Mais c’est pas que que l’état d’esprit au sens où on peut l’entendre. C’est plus justement ces aspects-là, c’est à dire défendre ensemble, faire des stops… Au début, vous me parliez toujours des rebonds. Les rebonds c’est d’abord de la responsabilité (individuelle). Qui a pris des rebonds offensifs ce soir ? Qui s’est jeté partout ? C’est (Terry) Tarpey par exemple. Et on a besoin de plus de ça. On n’était pas guerriers comme on l’était dans les dernières compétitions. Bien jouer c’est important mais avant de bien jouer il faut déjà empêcher les adversaires. On a survécu quand vendredi ? En première mi-temps parce que défensivement on manquait d’impact et de dureté mais on était quand même plutôt bien organisé et on faisait face. on était dans le match. Et quand la digue a sauté, on a coulé. Ce soir, quand on a fait de l’écart c’était quand même adossé sur notre attaque et pas sur notre défense. Nous on a beaucoup marqué mais on les laissait marquer. On était à 10 sur 14 à la mi-temps à 3-points. C’est quand même pas fréquent chez nous. Mais on avait que 4 points d’avance parce qu’on les laissait scorer. Il y a d’autres choses mais ça c’est quand même la priorité.
Il reste encore trois matches à disputer, vous avez déjà pensé à comment vous allez les aborder ?
Eh bien ça va être très difficile. Honnêtement je n’ai pas réfléchi hein, je vous le dis. Mais je me doute bien par contre qu’on ne va pas passer une bonne semaine. Mais déjà je vais faire jouer nos jeunes, pour qu’ils prennent de l’expérience. Que ça serve au moins à ça. C’est dommage la fin parce que le petit Francisco a fait des choses intéressantes aujourd’hui. Sur sa première rentrée en première mi-temps, il a amené du dynamisme, la pression défensive dont on avait besoin. Donc il va jouer. Je vais relancer (Elie) Okobo aussi et faire jouer tout le monde, le banc bien sûr. On essaiera de faire bonne figure quand même. J’espère qu’on va être capable quand même de rester ensemble et de bien finir même si ça ne change bien sûr absolument rien au constat d’échec.
Est-ce que le côté brutal de la défaite l’élimination implique nécessairement une réflexion sur votre avenir immédiat ?
Je le comprendrais mais ce n’est pas moi qui décide. Je suis sous contrat mais il y a plein de fois où un coach est sous contrat et malgré tout il est coupé. Mais ça, il faudra le demander aux dirigeants. Mais pour l’instant j’ai encore trois matchs. Je ne suis pas choqué que la question soit posée.
À Jakarta,
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