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ITW Christophe Millois, l’historique de Sportica : « On a perdu notre maison mais on n’est pas dehors »

Betclic ÉLITE - Il y a tout juste une semaine, Sportica a été détruit par un terrible incendie, le jour de Noël. Alors qu'il arpente les couloirs du complexe sportif depuis sa sortie de terre en 1986, Christophe Millois nous a raconté son Sportica.
ITW Christophe Millois, l’historique de Sportica : « On a perdu notre maison mais on n’est pas dehors »
Crédit photo : Christophe Millois

Il a tout connu à Sportica. Il a vécu l’ouverture de la salle en tant que membre de l’effectif cadets. Il a ensuite tout connu au BCM, membre de l’encadrement technique sans discontinuer depuis 1996, assistant-coach de l’équipe première ou directeur du centre de formation. Il a même joué une minute en Pro A, le 5 octobre 1991 lors d’une facile victoire gravelinoise contre Dijon (75-56).

Viscéralement attaché au territoire nordiste, Christophe Millois (59 ans) était l’une des personnes les mieux placées pour évoquer la signification de Sportica dans la cité gravelinoise. Sur la route pour un repas de Noël à Lille lorsque l’incendie s’est déclenché, le dirigeant a ouvert la boîte à souvenirs. « C’est une salle avec une âme, un vécu et un passé extraordinaire », souligne-t-il.

Christophe Millois au centre de Sportica (photo : Julie Dumélié)

Christophe, quelques jours après l’incendie de Sportica, comment allez-vous ?

Ça fait bizarre d’être sur un site comme celui-là car on l’a connu autrement, vivant… Je fréquente Sportica depuis 1986 et c’est assez particulier de voir ce désastre là. C’est incroyable la façon dont ça a pu se consumer. C’est triste pour tous les gens qui y travaillent. Sportica, c’était un lieu de vie, autour du sport. Ça créait toujours une ambiance très particulière et là, il n’y a plus rien.

Comment avez-vous vécu la journée du 25 décembre ?

Au début, on m’a averti qu’il y avait un feu mais côté piscine. Je me suis dit que c’était un peu curieux mais que ça allait vite être réglé car les pompiers sont à côté. Dans ma tête, ce n’était pas plus grave que ça. En fin de compte, on s’est vite aperçu que c’est un truc qui a pris une proportion incroyable. On ne le vit pas bien. En plus, personnellement, je n’étais pas sur place, je ne savais pas trop quoi penser, c’était vraiment impressionnant. C’était un 25 décembre où j’étais à table, mais sans être vraiment là. Je pensais à plein de choses : comment on va faire, qu’est-ce qui va rester, est-ce que la salle va être sauvée quand même ? Tu pars dans beaucoup de sens de réflexion.

Avez-vous vu la salle depuis ?

Les restes de Sportica capturés par Christophe Millois

Je suis arrivé sur place mardi. Il n’y a plus rien, plus aucun volume, plus de toiture, ça fait un vide : on voit le ciel, la tour des pompiers, une conception qui n’est pas habituelle. Rien qu’à voir la salle comme ça, je ne cache pas que les larmes coulaient toutes seules tellement c’est choquant. Mercredi, on a eu accès avec les pompiers. Mes collègues sont allés récupérer tout ce que l’on pouvait car l’un des vestiaires a été un peu épargné. Nous sommes contents d’avoir trouvé des bricoles mais il faut vite se projeter maintenant et trouver des solutions rapides (voir ci-dessous, ndlr).

Que représentait Sportica à Gravelines ?

C’est un truc un peu fou. Sportica a été le projet d’un maire socialiste, Albert Denvers. Avec la fusion des clubs de Grand-Fort-Philippe et de Gravelines, il a eu la volonté de créer un grand club et c’est ce qui s’est passé. Il a de suite lancé l’idée de Sportica, soit un regroupement des sports pour la ville de Gravelines. Il n’y a pas que le basket : il y a aussi six courts de tennis, deux terrains de squash, une piscine, un toboggan, une fosse de plongée, un dojo, etc. Tout ça dans une ville de 12 000 habitants ! C’était un lieu de vie pour sportifs. Ça a grandi en même temps que l’effervescence autour du BCM. On a connu ici la montée de Pro B en Pro A, il y a une ferveur qui s’est rapidement créée. C’était un lieu où l’on pouvait passer une journée complète : les gamins du centre de formation me disaient que c’était leur endroit de rendez-vous, qu’ils allaient à la cafétéria, qu’ils allaient voir les copains au tennis, qu’ils s’entraînaient, qu’ils allaient à la muscu, etc. Ça a été une ambiance créée à un endroit où il n’y avait rien et l’on s’est retrouvé avec une salle de 2 500 places. À l’époque, on disait que c’était trop grand, que l’on n’allait jamais remplir et on a bien vu en fin de compte que ce n’était pas un souci, bien au contraire. Elle était désormais trop petite car il y avait un projet pour l’agrandir.

Vous qui avez connu Sportica depuis le début, quels sont vos premiers souvenirs ?

C’était une salle magnifique. Évoluer là, c’était génial. L’ambiance était exceptionnelle. J’ai notamment connu les derbys contre Saint-Quentin qui étaient fantastiques. C’était la grande époque du SQBB avec Chris Singleton, Mike Gonsalves, Fabrice Courcier, etc. C’était une ambiance incroyable, où l’on passait de la petite salle de Grand-Fort-Philippe, Norbert Merlen, où l’on arrivait à mettre 1 000 personnes, à 2 500 places dans un stade qui était tout neuf, hyper innovant pour l’époque. Au Nord de Paris, il n’y avait pas de salle comme ça.

Et il y avait aussi une identité architecturale, avec la brique et le bois…

Sportica, une âme particulière… (photo : Julie Dumélié)

Tout à fait. C’est une salle qui marque les gens par sa conception. Encore de nos jours, quand je fais venir des familles pour le centre de formation, les gens disent encore que c’est beau, que c’est agréable. La brique et le bois, c’est très identitaire du Nord-Pas-de-Calais. Le bois, c’est les constructions navales. C’est aussi une façon d’accueillir le public, la simplicité des gens, la communion. On est quand même l’une des salles où tout le monde est mélangé. Ça montre un état d’esprit, il n’y a pas plusieurs VIP à plusieurs niveaux. Il y a toujours eu une communion comme lors des matchs de Carnaval en février. Certains ont été exceptionnels, on devait attendre que les Carnavaleux passent sur le terrain pour pouvoir recommencer l’échauffement. On a vécu des choses. C’est une salle qui a une âme, comme Beaublanc par exemple. Il y a un vécu, un passé extraordinaire. Il y a eu de vrais moments sportifs, mais pas que : aussi des concerts, comme Patrick Bruel. Il y avait toujours des évènements à Sportica.

Outre les derbys contre Saint-Quentin, à quels matchs repensez-vous immédiatement à l’évocation de Sportica ?

Il y a les matchs de Coupe d’Europe, comme la série avec l’Estudiantes Madrid en Coupe Korac en 1990. Je n’ai jamais vu Sportica aussi rempli que ce jour-là. Avant ça, il y a eu les playoffs pour la montée en Pro A en 1988. C’était incroyable, incroyable… L’ambiance qui pouvait s’en dégager, les joueurs qui pouvaient se transcender à l’époque pour le public. Des joueurs comme Larry Lawrence, Ernie Signars, Michel Herlem, Jean-Gérard Hannequin, etc, ont vraiment connu l’époque de la montée en puissance du basket à Gravelines.

Sportica, c’est aussi les grandes années Monschau, de qui vous étiez assistant, où Gravelines était au sommet du basket français, sans toutefois pouvoir concrétiser cela par un titre…

Avec Christian Monschau, c’est vrai qu’on a connu une période exceptionnelle. On perd trois matchs la première saison, neuf la seconde. C’était des années bonheur, avec des Cyril Akpomedah, J.K. Edwards, Juby Johnson, Yannick Bokolo, etc. On a créé de vraies équipes, avec un superbe état d’esprit. Gravelines est une petite ville qui a connu un essor impressionnant grâce à la centrale nucléaire et qui a su en profiter pleinement à travers le basket. Il y a un respect qui s’est installé aussi au sein du basket français, de par le vécu et l’état d’esprit qu’on véhicule : si tu es adversaire, même si tu es amené à perdre à Sportica, tu vis des moments sportifs qui restent exceptionnels.

Ces dernières années, le BCM était rentré dans le rang, l’ambiance n’était peut-être plus la même qu’avant mais cela restait tout de même spécial…

La terrible vue aérienne

Ça reste festif. Il y a une ambiance qui marque : un accueil où les gens sont cools, sympas, ne se prennent pas la tête. Il n’y a pas de différence entre les gens dans la salle, c’est vraiment un moment de partage entre tout. On vient pour se faire plaisir, pour vivre des émotions en commun et c’est le Nord ça. On parlait de Beaublanc plus tôt : Limoges a un public très compliqué, très dur et ce n’est pas le cas de Gravelines. Les supporters nous ont pardonné beaucoup de choses, ont toujours soutenu l’équipe. Malgré le manque de résultats, le public était là. On ne se faisait pas siffler, pas insulter. On pouvait sentir le mécontentement mais il y a aussi des échanges. Parfois, je me disais que c’était un peu comme à Marseille : un état d’esprit très chauvin mais respectueux. C’est une éducation que l’on donne au public. Ce qui faisait notre force, c’est la proximité des joueurs avec le lambda : le voisin, les parents à l’école, etc. Les joueurs sont accessibles à Gravelines, c’est important.

Le BCM Gravelines-Dunkerque peut-il se relever de cette tragédie ?

Il le faut. Si ça peut servir pour lever un nouvel état d’esprit… Quand je vois que des joueurs de l’équipe pro viennent participer au déblayage, à la récupération de matériel, ça fait plaisir. Tu comprends qu’ils se sentent réellement concernés et il faudrait maintenant que ce malheur les aide à se transcender pour faire encore mieux que ce qui était en train d’être fait actuellement. Cela pourrait aussi permettre de fidéliser un nouveau public, de créer d’autres supporters, si l’on est amené à se déplacer ailleurs. Il ne faut pas être revanchard par rapport à un coup du sort mais j’espère qu’il y aura une dynamique qui nous donnera une force supplémentaire pour avancer différemment. La marche est haute mais elle ne fait peur à personne. Il faut aller la chercher. On ne peut pas se plaindre : on a certes perdu un bel outil, on a perdu notre maison mais on n’est pas dehors. Il y a une solidarité qui existe, il faut se servir de cette force humaine, surtout de nos jours. C’est important, et ça nous ressemble aussi : dans la difficulté, les gens du Nord ne baissent pas les bras en général.

Quelles solutions pour le centre de formation ?

Directeur du centre de formation, Christophe Millois célébrant le titre de champion de France U18 du BCM l’an dernier (photo : Julie Dumélié)

« Il a fallu travailler rapidement pour trouver une nouvelle formule. Les solutions des pros ne sont pas forcément celles du centre de formation, on n’a pas les mêmes priorités. On a travaillé avec les services de la mairie de Gravelines qui ont tout mis en œuvre pour qu’on puisse repartir rapidement. Ça a été agréable de voir cet entraide. Au final, jusqu’au mois de juin, nos jeunes seront hébergés à la base nautique de Gravelines. Au niveau hébergement, c’est impeccable. On va récupérer la salle Norbert Merlen pour les entraînements du quotidien. Au niveau compétition, les U18 joueront dans la salle de la section jeunes du BCMGG à Grand-Fort-Philippe, Pierre Lepretre, tandis que les Espoirs joueront à Loon-Plage, soit en lever de rideau de l’équipe NM1 quand ils seront à domicile, soit le vendredi soir quand ils seront à l’extérieur, grâce à l’accord du président Laurent Loquet. »

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On ressent toute l'émotion et le souvenirs que procurait cette salle dans ce témoignage. par conte la phrase: "Parfois, je me disais que c’était un peu comme à Marseille : un état d’esprit très chauvin mais respectueux. " il n'a pas dû aller à Marseille souvent....
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