[L’œil de coach Soares] Les clés du match couperet face à la Lettonie
Déjà dos au mur, avec une défaite qui l’enverrait tout droit vers des déprimants matchs de classement 17-32, l’équipe de France affronte la Lettonie ce dimanche à 15h30 à Jakarta. Un match éliminatoire, en forme de vrai bon test pour les Bleus, face à une équipe diamétralement opposée au Canada, coachée par l’ancien cerveau strasbourgeois Luca Banchi. Ce qui change par rapport à vendredi ? Tout (ou presque)…
- En attaque
Composée d’un contingent de joueurs évoluant pour la plupart dans les grands championnats européens (hormis Davis Bertans, le seul en NBA), la formation lettone propose un jeu collectif en contrôle, réfléchi et efficace. En témoignent les plus de 23 passes décisives, pour moins de 12 ballons perdus sur leurs 5 derniers matchs (avec un incroyable 37 passes pour 5 turnovers face au Liban), ce qui en fait une des meilleures équipes au rapport passes / turnovers : 2, contre 1,29 pour la France ou encore 1,35 pour le Canada. On a donc affaire à une équipe qui aime faire travailler l’adversaire, avec une transition claire (enchainement de picks and roll isolés) et des systèmes de jeu plus long.
La deuxième différence se trouve dans les savoirs-faire spécifiques des joueurs. À l’inverse des Canadiens qui aiment finir avec agressivité au cercle, les Lettons sont plus à l’aise dans un jeu au large et sont de redoutables shooteurs. Avec plus de 30 tirs par match, c’est cinq de plus que la France. Ils seront en pleine confiance dans ce secteur du jeu après leur impressionnant 18/35 face au Liban.
Enfin, l’utilisation des joueurs intérieurs est beaucoup plus forte chez cette équipe lettone qui s’appuie sur leur 4 big men Pasecniks – Smits – Bertans – Grazulic au cœur du jeu : plus de sept tirs par match chacun. L’utilisation des postes 4 comme poseur de pick and roll est vraiment une spécificité du jeu letton et peut poser des vrais problèmes : en optant pour la défense de protection classique, on est en danger sur les pops (après avoir posé l’écran, le joueur intérieur s’écarte pour avoir un tir ouvert) et en choisissant le switch, on s’expose à des mismatchs, notamment avec Smits ou Grazulic (poste 4 qui opère beaucoup en 5 dans cette sélection).
- En défense
Adepte de la défense, Luca Banchi propose une organisation défensive, complètement à l’opposé de celle des Canadiens, qui demande une coordination des cinq joueurs avec beaucoup de rotations. En effet, on pourra observer :
- Des step out sur le pick and roll : intervention du joueur intérieur pour stopper le dribble.
- Des trappes dans le post-up : prise à deux sur l’attaquant lorsqu’il se montre agressif.
Ces deux choix stratégiques forts permettent de ne pas laisser jouer l’adversaire et le forcer à trouver des solutions collectives.
Quelle devront être les réponses pour les Bleus ?
Sans toutefois aller à l’opposé des principes collectifs dont nous avons parlé avant le Canada (défense ouverte, « stunts », prise en responsabilité rapide de la balle), les Bleus auront à cœur de se racheter et vont pouvoir travailler sur une réponse plus individuelle dans la gestion des duels défensifs avec beaucoup de pression sur les porteurs et les lignes de passe. Cela signifie aussi que les défenseurs des non porteurs devront se focaliser sur la lecture des situations afin de ne pas donner d’aides trop facilement, ce qui donnerait aux Lettons ce qu’ils recherchent : faire vivre la balle pour créer des avantages et trouver des tirs extérieurs ouverts.
Enfin, une stratégie sera sans doute mis en place côté français concernant les écrans posés par les postes 4. À première vue, le choix logique serait un switch automatique avec Bertans et de la protection avec Smits.
Côté attaque, on peut imaginer trois consignes du staff français :
- Imposer un rythme élevé et profiter de notre supériorité athlétique afin de développer du jeu rapide et valoriser les bonnes défenses
- Alimenter le post up (notamment Yabusele et Lessort qui auront des avantages) et travailler autour de la mobilité contre la trappe, notamment avec des coupes des joueurs de l’opposé, une des spécificités du jeu de Vincent Collet.
- Libérer rapidement la balle lors des pick and roll, soit par des « short roll » (passe rapide à l’intérieur lorsque son adversaire intervient pour stopper la balle), soit pour trouver le joueur à deux passes qui a un temps d’avance sur cette défense (son défenseur étant occupé à défendre l’intérieur qui roule vers le cercle).
- Les joueurs lettons à suivre
Les deux meneurs de jeu (le n°66 Kristers Zoorics et le n°55 Arturs Zagars) ont des profils très similaires : petit format, rapides, et scoreurs. Attention à ne pas les laisser prendre confiance (11 points – 6 passes décisives pour Zoriks et 4 points – 11 passes décisives pour Zagars contre le Liban).
Déjà évoqués plus haut, les deux postes 4 Rolands Smits (#11) et Davis Bertans (#8) jouent un rôle prépondérant dans cette équipe et sont au cœur du jeu. Ultra polyvalent, Smits est un ailier-fort moderne qui pose un vrai problème sur le pick and roll. Il est sans doute le joueur le plus important de cette équipe. De son côté, Davis Bertans est un shooteur plus que redoutable. Seul véritable poste 5, l’ancien levalloisien Anzejs Pasecniks (2m16, #32) est très intéressant par sa mobilité, sa capacité à poser la balle au sol et à finir les situations. Peu utilisé contre le Liban, on devrait le voir plus souvent sur le parquet face à Rudy Gobert.
Enfin, parmi les arrières, celui qui semble être le plus dangereux n’est autre que le frère de Davis Bertans, Dairis (Bertans #9), un shooteur d’expérience, auteur d’un magistral 6/7 dernière la ligne en 14 minutes face au Liban.
- Le rebond parfait ?
Pourtant, dans le sens où la Lettonie est l’antithèse parfaite du Canada, ce match représente une occasion en or pour l’équipe de France de se racheter des deux côtés du terrain Défensivement, on attendra un investissement individuel important de la part des joueurs qui se doivent de tenir leurs adversaires du jour tandis qu’offensivement, l’énergie collective et l’envie de se passer le ballon, comme en préparation, seront les clefs.
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