ITW Amine Noua, l’invité inattendu du Final Four : « Je n’aurais jamais imaginé être ici »
Amine Noua a rejoint le Fenerbahçe fin janvier
Et dire que sa saison européenne aurait dû s’arrêter le 9 janvier dernier, sur un non-match face au Galatasaray Istanbul, en barrages de la Champions League. Muet sur la série avec un triste 0/10 aux shoots, Amine Noua (2,02 m, 27 ans) venait alors de terminer avec un piteux -3 d’évaluation en 11 minutes lors de l’élimination de Tortone (89-95), reflet d’un passage très compliqué en Italie.
Échappé de la guerre en Israël, où il était pourtant particulièrement épanoui à Holon avant le sanglant week-end du 7 octobre, l’international français (9 sélections) semblait être bien retombé sur ses pattes à Tortone : club ambitieux, salaire intéressant, pas si loin de Lyon, contrat jusqu’en 2025 à la clef. Mais trois semaines après son arrivée, un nouvel entraîneur a débarqué dans le Piémont : Walter de Raffaele, qui n’avait pas vraiment idée de qui était Amine Noua. Mal utilisé, cantonné dans un corner, il lui fallait une porte de sortie.
La France, forcément ? Oui, presque. Le triple champion a été proche d’un accord avec la SIG Strasbourg, où il gardait un excellent souvenir de son bref passage en 2022. D’autres clubs s’étaient également positionnés : l’ESSM Le Portel, l’Élan Chalon, la Chorale de Roanne, etc. De quoi rendre la nouvelle d’un appel du Fenerbahçe complètement improbable lorsqu’elle lui est parvenue. Lorsque son agent lui en parle, le joueur croit à une blague.
C’est pourtant bien réel : un contrat jusqu’à la fin de la saison chez un grand d’Europe, alors qu’il était progressivement porté disparu en Lega, avec certes une option de sortie au bout d’un mois côté club. Mais dès son premier match d’EuroLeague face à la Virtus Bologne, Amine Noua séduit immédiatement Sarunas Jasikevicius. Dès son premier match d’EuroLeague, il séduit face à la Virtus Bologne. « Déjà, la première impression en dehors du terrain a été excellente », indiquait alors le technicien balte en conférence de presse. « Il n’a fait que deux entraînements avec nous et on l’a jeté au feu, ce n’était pas facile. Mais ses séances ont été très bonnes : il a rapidement compris ce qu’on attendait de lui et ses entraînements ont été très solides. Un vétéran avec une bonne compréhension du jeu et une vraie solidité, c’est typiquement ce dont on avait besoin à ce moment-là de la saison. »
De quoi valider son engagement pour le reste de la saison. Un vrai moment d’émotion, après les instants chaotiques en Israël et en Italie. Depuis, son rôle est beaucoup plus fluctuant (une seule apparition en BSL ; 4,2 points à 54% et 2,8 rebonds en 12 matchs d’EuroLeague) mais Amine Noua va découvrir le grand monde, qualifié pour le Final Four de l’EuroLeague. « Il est ultra heureux », se réjouit son représentant, Guillaume Althoffer. « Il est au septième ciel, il apprend vraiment beaucoup. C’est une magnifique histoire que je répète à certains de mes jeunes. Beaucoup auraient choisi la facilité ou se seraient mis à pleurer : Amine a fait preuve de courage à Holon et de patience à Tortone. Il n’a pas fait un choix économique car ce n’est pas drôle de partir en se disant qu’on peut se faire couper au bout de trois jours. Tout le monde le considérait comme un joueur uniquement offensif et je le vois aller sur tous les rebonds offensifs, poser des écrans, faire le travail de l’ombre, etc. Il a franchi un vrai cap et c’est l’une des plus belles histoires que j’ai pu avoir durant ma carrière. »
Utilisé lors de deux rencontres de la série face à l’AS Monaco, Amine Noua a payé le retour de Johnathan Motley mercredi et était 13e homme lors de l’épilogue à Gaston-Médecin. Pas de quoi altérer son émotion. Pendant que ses coéquipiers continuaient à célébrer le billet pour Berlin dans leurs vestiaires, il s’est arrêté à notre micro dans les couloirs de Gaston-Médecin afin de confier toute son émotion.
Amine, à quel point était-ce stressant de vivre ce Match 5 en civil ?
(il souffle) Vu de l’extérieur, c’était encore plus irrespirable ! Je ne peux même pas le décrire, il faut vivre le truc pour l’expliquer. C’était incroyable. Je n’ai jamais vécu un match avec autant d’émotions. Ça aurait pu basculer des deux côtés mais Monaco n’a pas démérité. C’est une équipe vraiment talentueuse, ça a été une série tellement éprouvante. Ça se voit sur le visage de mes coéquipiers, ils sont épuisés. Je suis si fier de l’équipe, si fier du parcours. On s’est battu comme des chiens. Et c’est fou de me dire que je vais jouer mon premier Final Four… Je n’en reviens pas.
Vous vous voyiez jouer un Final Four un jour ?
Honnêtement, cela faisait partie de mes objectifs. J’ai toujours cru en moi. J’ai toujours regardé les Final Four depuis chez moi à la télévision et c’était un but d’y accéder. Alors y être pour de vrai, c’est incroyable. Mais ce n’est pas fini, il reste deux matchs à aller chercher maintenant (il sourit). On veut aller jusqu’au bout. On a déjà battu le Panathinaïkos, on a déjà battu le Real Madrid. Je crois en mon équipe, on peut le faire.
« Le Match 4 a été un coup de massue »
Que peut-on dire de la dernière minute de Nick Calathes ?
Il n’y a pas grand chose à dire, à part que c’est l’un des plus grands (il le répète). De côtoyer une telle légende tous les jours, c’est incroyable. Je n’aurais jamais imaginé être ici. Il a vraiment pris ses responsabilités à la fin et mettre ses tirs, c’est… (il s’interrompt) Ce sont deux des tirs les plus importants de sa carrière.
Perdre le Match 4 a dû être un crève-cœur, d’autant plus que personne n’avait jamais gagné de Match 5 à l’extérieur. Comment avez-vous su vous remobiliser ?
Le Match 4 a vraiment été un coup de massue. Pour nous, pour nos supporters, pour tout le monde… On avait tant misé sur ce match et finir à la maison aurait été la plus belle des manières. Mais tout peut arriver, il faut s’imaginer tous les scénarios possibles. Ça a été dur mais on s’est remobilisé dès le lendemain. On est allé de l’avant. On s’est dit qu’on savait comment les battre, qu’on l’avait déjà fait deux fois, y compris à Monaco. On n’avait pas d’autre choix que de retourner gagner à Gaston-Médecin. On s’est tous regardé dans la glace, on a étudié nos erreurs, on les a corrigés ce (mercredi) soir et ça nous a réussi. Je suis très, très fier de l’équipe, du coach.
« Je ne pouvais pas laisser filer la chance du Fenerbahçe »
Votre histoire est complètement folle cette saison : en octobre, vous étiez sous les bombes avant de vous retrouver dans une mauvaise situation à Tortone…
Comme quoi il ne faut jamais abandonner et toujours aller de l’avant… C’est sûr que cette année a été extrêmement compliquée. Au mois d’octobre, je n’aurais jamais imaginé me retrouver ici. On ne sait pas de quoi l’avenir est fait. Il faut toujours être positif, aller de l’avant et faire confiance au processus.
Dans quelles dispositions mentales étiez-vous en Italie ?
J’étais dans le dur. J’étais dans un championnat et un pays que je ne connaissais pas, et ça se passait très mal. Mais j’ai appris là-bas ! Je ne vois pas ça comme un échec, plus comme un apprentissage qui permet de grandir et d’évoluer, aussi bien humainement que sportivement. Après l’Italie, le Fenerbahçe m’a donné une chance. Je ne pouvais pas la laisser filer, j’ai montré ce que je pouvais faire et je pense avoir mérité mon contrat jusqu’à la fin de la saison. Maintenant, je suis fier de me retrouver au Final Four.
Cela donne un rebond assez formidable…
Ah oui, c’est sûr. Des opportunités comme celles-ci, on n’en aura peut-être pas deux dans nos vies… Je ne pouvais pas la laisser passer. Je me suis directement intégré à l’équipe, ça a matché. Même si je n’ai pas fait partie du groupe, je suis quand même là. Je reste un joueur disponible, prêt à tout moment à aider l’équipe.
Propos recueillis à Monaco,
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