« Il vit une période délicate, comme il en a rarement connu » : Nolan Traoré, le rookie wall ?
Nolan Traoré est actuellement dans le dur
Si cela était aussi facile, ça se saurait… À moins de s’appeler Victor Wembanyama, et d’être un phénomène intergénérationnel, même les plus gros prospects connaissent toujours des périodes de creux. On se rappelle ainsi du printemps difficile traversé par Zaccharie Risacher, ce qui ne l’a pas empêché d’être sélectionné en première place de la Draft NBA quelques semaines plus tard.
Insuffisant en défense et au tir
Pour Nolan Traoré, aussi projeté dans le Top 5 de la cuvée 2025, c’est en ce moment… « Il vit effectivement une période délicate, comme il en a rarement connu depuis qu’il a démarré le basket », confirme son coach, Julien Mahé. Alors que Saint-Quentin joue son avenir européen ce mercredi, à Rhodes, le prospect tentera de sortir la tête de l’eau. Ce qu’il a réussi à faire samedi à Chalon, mais uniquement d’un point de vue statistique (12 points et 4 passes décisives). Car ces chiffres agissent en réalité en trompe-l’œil… Au Colisée, le Francilien est apparu dépassé en défense, incapable de contenir Michael Stockton sur plusieurs situations. « C’est sûr que j’attends beaucoup plus de lui défensivement », poursuit le technicien breton. « Il est battu trop régulièrement dans les duels. C’est un aspect du jeu où il doit absolument progresser. »
Autre souci récurrent ces derniers temps : l’adresse. Depuis qu’il a dévissé contre l’ASVEL le 27 octobre (1/12 aux tirs), Nolan Traoré a du mal à retrouver la cible, même s’il continue de shooter avec de gros volumes (9 tirs en 13 minutes contre Gravelines-Dunkerque, 12 en 21 à Chalon), prouvant qu’il ne perd au moins pas confiance en ses capacités. Sur ses dix derniers matchs, le meneur axonais présente un total douteux de 27/99, soit 27,3% de réussite, dont 8/40 à 3-points… Avec quelques nouveaux gros trous d’air : 1/11 contre Paris, 1/9 face au BCM…
Des difficultés qui se traduisent dans les statistiques avancées. Le meneur du SQBB présente un usage rate (le pourcentage de possession de son équipe qu’il joue lorsqu’il est sur le terrain) inouï : 31,6%. Inédit chez tous les prospects européens depuis 30 ans, si ce n’est Victor Wembanyama, selon DraftExpress. En gros, lorsque Nolan Traoré est sur le parquet, une grosse partie du jeu picard tourne autour de lui. Sauf qu’il a du mal à convertir cela en efficacité réelle… Sa moyenne de points par possession est la 14e plus faible du championnat : 0,71. Problématique, lorsque seul Nadir Hifi joue plus de possessions que lui en Betclic ÉLITE (34%). Idem, avec sa moyenne de points par tir tenté (0,89) : là aussi, seulement 13 joueurs font pire dans la ligue… Enfin, son net rating (différence entre offensive rating et defensive rating) est de -19,9, le deuxième plus mauvais de son équipe. Un chiffre abyssal puisqu’il signifie 20 points de plus pour les adversaires du SQBB, sur 100 possessions, lorsque Traoré est sur le parquet.
La conséquence du changement de statut ?
« C’est un jeune joueur, les saisons ne sont linéaires pour personne, et encore moins pour un jeune de 18 ans encore en période d’apprentissage », plaide Julien Mahé. « Ce qu’il vit actuellement n’est pas toujours simple à gérer. On est là pour l’aider, pour l’accompagner. On savait que ce ne serait pas un long fleuve tranquille. » Quels facteurs d’explication peut-on avancer ? Une usure mentale ou physique ? « Je ne sais pas », répond le coach. « C’est sûr qu’il enchaîne cela dit. » Entre la fin de saison de Betclic ÉLITE, l’EuroLeague juniors, son statut de sparring-partner avec les Bleus, l’EuroBasket U18, la reprise avec Saint-Quentin et ses deux premières sélections en équipe de France fin novembre, Nolan Traoré n’a jamais coupé. La fin de l’effet de surprise, aussi ? Peut-être… Au printemps dernier, l’ancien pensionnaire de l’INSEP a débarqué au SQBB sans être spécialement attendu, ni scouté. « La saison dernière, c’était vraiment une surprise pour les équipes adverses et là, c’est clair qu’elles sont plus préparées », explique-t-il à Basket Le Mag. « Je le prends plutôt bien, ça veut dire qu’on respecte mon jeu et qu’on essaye de le stopper. » Lui n’a peut-être plus la même candeur qu’au printemps non plus, avec un nom qui a fait le tour du monde depuis, et des prétendants aux quatre coins de la planète cet été, avant d’opter pour une prolongation dans l’Aisne.
Qui dit gros talent dit aussi grosses responsabilités. Et Nolan Traoré a fait les frais de ses difficultés du moment en étant récemment renvoyé sur le banc : 12 minutes à Dijon, puis 13 face au BCM Gravelines-Dunkerque, il n’avait jamais joué si peu avec Saint-Quentin, même lors de son tout premier match contre l’AS Monaco à sa sortie du Pôle France. Que le SQBB ait voulu prolonger Enzo Goudou-Sinha, donc tourner avec trois meneurs (Lucas Boucaud en plus), n’est également pas un hasard non plus. Reste que cette période trouble n’affecte pour l’instant pas sa cote en NBA. Média de référence à ce sujet, ESPN l’a encore pronostiqué à la 5e place mardi. « Alors même qu’il ne joue pas bien, le talent pur de Traoré se manifeste de manière éclatante : personne ne peut le contenir, et il parvient à créer un grand nombre de bonnes opportunités de tir pour ses coéquipiers grâce à son exceptionnelle tenue de balle, son accélération, sa vision du jeu et sa créativité dans les passes, tout en réussissant un grand nombre de tirs à trois points en sortie de dribble », écrit le spécialiste Jonathan Givony. L’apprentissage du haut niveau, c’est aussi ce genre de moment…
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