Récit d’une crémaillère réussie à Gerland : l’ASVEL peut-elle basculer dans une nouvelle dimension ?
Le Palais des Sports de Gerland, nouvelle terre d’accueil de l’ASVEL Féminin
Cela ne pouvait se terminer que comme ça… 33 ans après la mythique Coupe Davis remportée par l’équipe de France de tennis le 1er décembre 1991 contre les États-Unis, le titre Saga Africa a de nouveau retenti au sein du Palais des Sports de Gerland. Cette fois, il n’y avait cependant pas Yannick Noah sur le terrain pour chanter, l’ensemble des Bleus en chenille derrière lui et 8 300 spectateurs en liesse dans les tribunes. Tout au plus quelques dizaines de VIP, mêlés aux dirigeants, désireux de prolonger la fête d’une installation réussie, 90 minutes après le buzzer scellant la première victoire de l’ASVEL (75-70 contre Villeneuve-d’Ascq) comme club résident à Gerland.
Après une récente séquence marquée par une série d’inauguration d’enceintes dernier cri (CO’Met, LDLC Arena, Adidas Arena), il n’était pas banal de vivre un emménagement dans une salle érigée il y a… 63 ans. Cela participe d’ailleurs grandement au charme du Palais des Sports de Gerland, resté dans le jus des années 60, lui conférant un cachet certain, « La première fois que l’on rentre, il y a un effet waouh avec cette architecture atypique », décrit Paoline Salagnac, la directrice sportive de l’ASVEL. Quand on pousse les portes de l’arène de Gerland, les regards se dirigent inévitablement vers le toit, où trône en majesté l’emblématique voûte céleste, avant de se perdre dans les travées et ces sièges rouges, verts, jaunes, oranges qui ornent les étages. « C’est une salle mythique, un lieu qui se respecte », poursuit l’ancienne arrière de Bourges. « C’est impressionnant de pouvoir l’intégrer. À nous d’être à la hauteur de ce monument lyonnais. »
« Une nouvelle ère qui démarre »
À l’étroit dans sa salle Mado Bonnet (1 200 places), devenue trop exiguë pour les grandes soirées européennes, à tel point que l’ASVEL, issue de l’équipe lyonnaise du Lyon Basket Féminin, était contrainte d’aller se produire à l’Astroballe, sur la commune de Villeurbanne, le club s’est vu proposer par la mairie l’opportunité de redonner vie à une salle emblématique, certes utilisée ponctuellement mais privée de club résident depuis l’intermède JET Lyon (entre 1990 et 1996)… La municipalité a investi plus de 330 000 € afin de remettre la salle aux normes et d’installer le parquet et les paniers. « C’est une nouvelle étape dans la construction du club », souligne Paoline Salagnac. « Il y avait ce besoin d’avoir un outil à la hauteur de nos ambitions. Cette arrivée au Palais va nous permettre d’enclencher une dynamique nouvelle, d’accroitre notre écosystème et d’attirer beaucoup plus de monde. C’est une nouvelle ère qui démarre. »
Laquelle s’est donc ouverte dimanche après-midi en grandes pompes, le maire Grégory Doucet remettant symboliquement les clefs de la salle au club. Fut un temps où le Palais des Sports de Gerland pouvait accueillir 10 000 spectateurs pour les grands matchs européens de l’ASVEL. La légende locale raconte même que 12 000 personnes sont venues s’y entasser lors de la demi-finale retour de la Coupe des Coupes contre Kaunas en 1985, l’une des dates les plus tragiques de l’histoire du club avec une balle de finale qui roula sur le cercle avant de ressortir. 40 ans après, la configuration a bien baissé puisque la réception de Villeneuve-d’Ascq a fait le plein, avec « seulement » 5 405 spectateurs. Les footballeurs Jordan Veretout et Maxime Gonalons étaient présents, tout comme les blessés villeurbannais Charles Kahudi et Mbaye Ndiaye. Mais pas le président Tony Parker, en voyage aux États-Unis…
Comme les joueuses, avec un nombre inédit d’airballs et de lay-up ratés, le public lyonnais a dû attendre un certain temps avant de s’approprier l’enceinte. « On a vu la différence entre les supporters du début de match et ceux de la fin », sourit Dominique Malonga. Effectivement, l’emballage final a prouvé le potentiel acoustique du Palais, transformé en chaudron dans le quatrième quart-temps. « La salle a explosé à la fin et ça les a portées dans le money-time », lance Maxime Bezin, le coach vaincu. « Je suis extrêmement content d’avoir pu vivre ce genre d’ambiance et de voir que cela existe dans le basket féminin. Félicitations à l’ASVEL car c’est un bel outil, j’espère qu’elles vont bien l’utiliser. »
La rampe de lancement pour un retour vers l’Europe ?
Il faudra évidemment voir à quoi ressemblera l’ambiance, quand le Palais prendra une configuration plus feutrée avec 3 000 spectateurs, mais les Lyonnaises ont tout autant apprécié. « Le public était tellement investi que les gens derrière moi écoutaient les temps-mort et étaient à deux doigts de me dire : « On rentre quand, coach ?! », en rigolait Yoann Cabioc’h. « Ça résonne énormément, ça n’a rien à voir avec Mado Bonnet », ajoute Malonga. « C’est une salle bruyante, un chaudron ! Le son est différent avec la configuration des lieux mais on adore ça ! »
Censé être la rampe de lancement qui propulsera l’ASVEL vers les sommets européens, avec une première soirée continentale programmée dès mercredi en 1/8e de finale retour de l’EuroCup (72-77 à l’aller contre le Galatasaray), le Palais est officiellement devenu dimanche la plus grande salle de La Boulangère Wonderligue. Stratégiquement situé dans Lyon, au cœur de la cité des sports imaginée par Tony Garnier, implanté juste en face du stade de Gerland, il présente surtout l’avantage d’être collé à la Tony Parker Adéquat Academy, où sont logées les jeunes pousses de l’ASVEL. « C’est aussi la première fois qu’on va avoir un lieu unique pour tout le club », renchérit Paoline Salagnac. « Les secteurs administratifs et sportifs seront réunis au même endroit, ça va nous permettre de fluidifier les liens. »
Sportivement engagée dans une phase de transition, devant composer avec une baisse significative du budget qui a conduit à l’exode de toutes ses stars, l’ASVEL repart toutefois de loin et ne se retrouvera pas à disputer les sommets de l’EuroLeague par la seule grâce d’un emménagement. « On ne va pas avoir un déclic du jour au lendemain avec l’entrée dans la nouvelle salle », tempère Yoann Cabioc’h. « Mais on a l’outil maintenant. On doit encore s’approprier les lieux. Ça peut faire venir de nouvelles personnes au club : des partenaires, des joueuses, des spectateurs. Je pense aussi que cela peut nous aider à passer dans une nouvelle dimension. Ce sera cependant sur plusieurs mois ou années. On ne construit pas une entité européenne en deux temps trois mouvements. » En attendant, la pendaison de crémaillère a été réussie, et c’est déjà pas mal… « On se souviendra de cette première », pouvait glisser Dominique Malonga en quittant sa nouvelle maison.
À Lyon
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