Brillant face à LeBron, l’ancien roannais Nuni Omot improbable star des JO : « Je ne suis pas censé être ici »
L’international sud-soudanais Nuni Omot a brillé face à LeBron James et Team USA
Habituellement, même en NBA, pas grand monde ne se risque à chambrer LeBron James. Alors là, venant d’un joueur n’ayant joué au plus haut niveau, c’était encore plus surprenant… Alors qu’il venait de scorer à 3-points sur la tête du Laker à la 16e minute (43-26), Nuni Omot (2,05 m, 29 ans) l’a pointé du doigt, puis lui a fait le signe « trois » avec sa main. Le blasphème ultime face à King James ? Peut-être… L’international américain a esquissé un petit rictus amusé puis s’est mis en tête de faire payer l’impétueux Omot de son irrévérence. Isolation sur la possession suivante, post-up et ballon… volé par le Sud-Soudanais. Évidemment pas de quoi permettre aux Bright Stars de créer l’exploit (86-103), mais une séquence qui restera marquante dans son parcours.
Un +/- positif face à Team USA
« C’est un honneur que de l’affronter », confiait après la rencontre celui qui possède également la nationalité américaine grâce à son enfance passée dans le Minnesota. « Peu de gens peuvent dire qu’ils se sont mesurés à l’un des meilleurs joueurs de tous les temps. Sa longévité est absolument incroyable. » Surtout qu’il n’a pas fait que défier LBJ sur une seule possession… Nuni Omot a surtout signé l’un de ses tous meilleurs matchs en carrière face à Team USA, terminant meilleur marqueur de la rencontre avec 24 points à 8/12, 2 rebonds, 2 passes décisives, 2 interceptions et 0 balle perdue pour 25 d’évaluation en 28 minutes. Le seul Sud-Soudanais à avoir un +/- positif (+3) ! « Je voulais montrer que je suis capable d’évoluer à ce niveau-là. Il fallait que je le fasse car le monde entier nous regarde. Beaucoup de joueurs m’ont dit que j’appartiens à cette caste, que je peux jouer avec les plus grands. Ce match a prouvé mes capacités. »
La performance d’une carrière, en relief d’une vie chaotique. Aux Jeux Olympiques, Nuni Omot se produit sous les yeux de sa mère, Pillow, l’héroïne absolue de sa vie, comme il l’a encore répété cette semaine. « Elle a marché plus de 700 kilomètres quand elle était enceinte de moi ! » Un périple de Gambela, en Éthiopie, vers la frontière kenyane, afin d’échapper à la guerre civile. Mais la famille Omot se fait arrêter, puis libérée avec l’aide des Nations Unies et installée dans un camp de réfugiés à Nairobi. Là où le petit Anunwa, dit Nuni, voit le jour en 1994, y passant les trois premières années de sa vie, dans des conditions pas toujours décentes, survivant à une pneumonie, avant d’émigrer vers les États-Unis sans son père, Kwat, interdit d’entrée sur le sol américain pour raisons de santé. Il ne le reverra ensuite pas avant 2018, soit 21 ans après ! « Je ne suis pas censé être ici », s’émeut-il depuis les JO.
Aphone à la Chorale
Et son parcours professionnel ? Presque aussi instable que son histoire personnelle… Professionnel depuis 2018, Nuni Omot cumule les sauts de puce (une seule saison dans le même club, lors de son année rookie) et les destinations improbables (MZT Skopje, ZZ Leiden, Al-Ahli, Taichung Suns). En 2023/24, entre des contrats à Taïwan et en Chine, l’intérieur a même transité par la Chorale de Roanne. Une parenthèse largement oubliable dans sa carrière, avec un comportement qui n’aura pas toujours fait l’unanimité dans la Loire, un caractère difficile à cerner, une blessure aux ischios-jambiers dès sa deuxième sortie et un départ de son propre chef, faute de garantie de temps de jeu (16 minutes de moyenne). « Il voulait plus de temps de jeu et moins partager avec l’autre coéquipier. Moi je veux des guerriers, pas un déserteur », avait ainsi tonné Jean-Denys Choulet dans les colonnes du Progrès. Doté d’un gros ego, ce qui a pu lui jouer des tours avec certains coéquipiers similaires comme D.J. Cooper, Omot avait du mal à accepter la concurrence de Jalen Jones « Je ne voulais plus être là-bas », ressassait-il mercredi, alors qu’il montre une bien meilleure image en France que lors de son passage en Betclic ÉLITE. « Il y a toujours deux versions dans une histoire. Il y a eu quelques problèmes avec le coach, des choses dites qui ont fait que je ne voulais plus jouer à Roanne. » Parti ensuite en Chine, où il a scoré en vain dans une équipe de cancres (11 défaites en 11 matchs, 25,1 points de moyenne), il a fini la saison en Israël avec le Maccabi Ramat Gan (15,2 points).
Des altitudes loin d’être aussi élevées que celles où il officie actuellement, avec le Soudan du Sud, sur la plus grande scène sportive mondiale. « C’est complètement fou de se retrouver ici », savoure-t-il. « Personne ne connait notre pays et on se retrouve aux JO, face aux tous meilleurs, je n’aurais jamais pensé que cela puisse arriver. » Et un tournant dans sa carrière, forcément, lui dont le CV européen se résume à cinq matchs de FIBA Europe Cup et trois de BCL ? « On ne sait jamais qui regarde et il y a plein de joueurs qui ont obtenu de gros contrats après les JO », rappelle-t-il. « Les gens vont me connaître maintenant. » À commencer, peut-être, à Roanne, où ce n’est pas son timide passage de l’automne dernier qui aura permis d’éclaircir le mystère Omot…
À Villeneuve-d’Ascq,
Commentaires